article paru la semaine dernière dans le journal La Croix
Pour gagner dimanche, poursuit-il, les candidats socialistes se tournent d’abord vers les autres partis de gauche et les abstentionnistes. S’ils espèrent, naturellement, profiter, en outre, de reports de voix centristes, ils s’adresseront directement aux électeurs du MoDem.
Pour une partie des responsables socialistes, tendre la main aux centristes au niveau national n’aurait de sens qu’après un éventuel accord programmatique, à négocier ultérieurement en toute transparence.
Si une telle ouverture peut parfois avoir une utilité tactique au niveau local dès aujourd’hui, il revient, de toute façon, aux responsables locaux d’en discuter et d’en décider. « On ne m’a pas consulté sur cette question qui bouleverserait les alliances logiques du parti », souligne encore Renaud Lagrave.
Un tel appel aux électeurs pourrait, certes, avoir un impact dans certaines circonscriptions, où socialistes et nouveaux centristes du MoDem n’ont jamais eu de différends trop violents. En revanche, il est difficile à imaginer dans d’autres, où des personnalités de centre droit devenues MoDem affrontent depuis des années la gauche locale.
Toutefois, dans certains départements, c’est justement cette cacophonie au sommet qui fait débat et éclipse l’événement lui-même. Tous soulignent la soif d’unité des militants. « Les gens me disent : “C’est quoi ce bazar ? Ils se disputent tout le temps au sommet, à trois jours de l’élection, ça ne fait pas sérieux.” Un camarade a même envisagé de rendre sa carte à cause de cela ! », déplore Jérôme Lambert, député PS sortant de Charente.
« Des électeurs du MoDem m’ont dit qu’ils voteraient pour moi au second tour, parce qu’ils me connaissent mieux que la candidate UMP. Les relations humaines sont plus importantes que l’idéologie, c’est aussi là dessus que se font les reports de voix », ajoute ce proche de Laurent Fabius.
Même là où l’appoint des voix centristes pourrait peser le plus lourd, l’initiative de Ségolène Royal n’est cependant guère prisée. « Si on interprète – ce que je ne fais pas – cette main tendue comme une volonté d’accord politique, d’alliance, c’est en effet prématuré », explique le maire du 14e arrondissement de Paris, Pierre Castagnou, qui a accepté d’être le suppléant du député Vert sortant Yves Cochet, à Paris.
En revanche, observe-t-il, les militants comprennent que les candidats – et non pas la direction du PS – s’adressent aux électeurs MoDem de leur circonscription. Pour battre l’UMP Nicole Guedj dans la 11e de Paris, le « ticket » Verts-PS compte ainsi sur les reports de voix centristes de Marielle de Sarnez (18,37 % au premier tour). Celle-ci a conseillé à ses partisans de choisir le « pluralisme », un geste apprécié à gauche. « Cela est possible parce qu’il n’y a pas eu d’attaques personnelles entre Sarnez et nous au premier tour », se félicite Pierre Castagnou.
Au siège du Parti socialiste, Laurent Fabius lui-même a, une nouvelle fois, pris ses distances vis-à-vis de Ségolène Royal. « Ce sont les électeurs qui décident librement. Il n’y a pas lieu d’avoir des combinaisons entre responsables des appareils », a-t-il affirmé hier.
Frédéric NIEL