« Je n’oublierai pas la leçon »
Publié par cedric - le 31/03/2008

RENAUD LAGRAVE. Le premier fédéral du PS landais, désormais élu et chef de l’opposition au Conseil municipal montois, revient sur les municipales. Entretien

:Recueilli par Jean-Pierre Dorian et Jean-François Renaut

Renaud Lagrave est rentré jeudi du Conseil national du Parti socialiste dans sa nouvelle peau. Premier secrétaire fédéral du PS landais en charge de délivrer un message, mais surtout, à partir de la semaine prochaine, pour la première fois élu de la République et siégeant comme chef de file et porte-parole de l’opposition au Conseil municipal montois.

« Sud Ouest ». Quelles sont les nouvelles nationales du PS ?

Renaud Lagrave. La bonne nouvelle, c’est qu’il y aura véritablement un congrès du 7 au 9 novembre à Toulouse. D’ici là, il y aura de grandes étapes à respecter avec une réflexion collective sur les statuts et de grandes déclarations de principe. Globalement, ce délai nous laisse le temps de discuter et de capitaliser sur cette victoire aux municipales. Parce que d’ici là, nous avons plus que jamais un rôle d’opposition à jouer.

Comment capitaliser justement ?
Au niveau départemental, nous lançons une campagne d’adhésion, avec une carte postale tirée à 50 000 exemplaires. Elle est adressée à tous ceux qui ont fait campagne avec nous et pour nous. Le message qu’elle porte, c’est : « on a besoin de vous pour reconstruire la gauche et proposer une vraie alternative en vue de 2012 ». Ce doit être notre objectif prioritaire.

Quelles leçons avez-vous retenu de cette campagne dans les Landes ?
Peut-être, sans doute, aurions-nous dû plus politiser cette campagne à certains endroits et parler plus fort sur des sujets nationaux. Mais à froid, j’ai deux analyses, deux leçons à tirer. 1. Il y a de plus en plus d’endroits, y compris certains que l’on a gagnés, où les élus ne tiennent plus compte de ce qui se passe au PS et s’autorisent à ne plus avoir de relations avec le parti. Une fois élus, ils oublient qu’ils l’ont été grâce aux militants, aux colleurs d’affiches, etc. Tout cela participe à brouiller le message. 2. Partout où l’on a été divisé, divisions récentes ou issues du passé d’ailleurs, on a été battus ou on a failli se planter. Pour prendre l’exemple de Saint-Martin-de-Seignanx, on gagne, mais il a fallu pour cela exclure une conseillère régionale (ndlr : Martine Hontabat). Franchement, on n’a pas fait cela par plaisir, mais s’il faut le refaire, on le refera.

Vous imputez-vous des erreurs, comme à Parentis ou à Mont-de-Marsan ?
Parentis, c’est le seul endroit où on ne va pas dans le sens des militants et on le paie : je n’oublierai pas la leçon. Comme celle de Mont-de-Marsan, même si c’est un cas atypique. Là-dessus, je plaide coupable : sans doute devrons-nous à l’avenir réfléchir à mieux préparer les transitions.

Voulez-vous dire que vous auriez dû inciter Philippe Labeyrie à ne pas se représenter ?

Philippe pensait qu’il était encore en capacité d’être maire. Pour moi, le seul débat qui existe, depuis le départ, c’est : quelqu’un d’autre était-il ou pas candidat face à lui pour l’investiture ? En tant que premier fédéral, objectivement, que devais-je faire ? Je n’étais pas en situation d’imposer quoi que ce soit. Moi, en conscience, j’ai tout fait, y compris m’engueuler avec de vrais amis, pour essayer de conserver cette ville à gauche. Je crois même avoir évité qu’il y ait plus de dégâts. Je me reproche plein de choses, mais je me refuse aujourd’hui à dire « y’avait qu’à » ou « fallait qu’on ».

« Toutes les défaites sont imputables à la fédération, mais aucune victoire ne nous est gratifiée »

N’aviez-vous pas, en tant que responsable du PS, à adopter une attitude plus ferme ?
Quelle autre posture pouvais-je avoir ? Ne pas être sur la liste, ne pas faire campagne et dire non à la candidature de Philippe ? À partir du moment où la ville votait à gauche depuis 1997, sortait de 51 % aux présidentielles et 54 % aux législatives, pouvais-je faire autrement que foncer avec lui ? Je pose la question, je n’y réponds pas. Je ne souhaite pas dire que c’est la faute d’untel ou d’untel et il n’est pas question de faire une « fixette » sur Philippe Labeyrie, parce que je suis sûr que viendra le moment où ses mandats et son bilan seront réhabilités. On s’est planté collectivement, moi le premier, mais si j’y suis pour quelque chose, je ne suis pas le seul.

N’avez-vous pas été trop confiants sur l’issue du vote ?

C’est possible, j’en conviens. Le parti a ses responsabilités là-dedans, j’en assume ma part. Sans doute aurais-je dû mieux sentir les choses.

Et quand Labeyrie dit : « si Alain Vidalies était resté mon premier adjoint, il serait maire aujourd’hui », le suivez-vous ?
Une chose est certaine : il aurait été la tête de liste la plus naturelle qui soit, c’est évident. Après, dire qu’il aurait gagné les élections, qui peut en être sûr ?

Dans la série couac, il y a aussi eu le cas Boudey aux cantonales ? (1)
À partir du moment où il est dit que depuis 2001, ce sont les candidats eux-mêmes qui doivent s’inscrire à la préfecture, je n’assume rien. Si c’était le rôle du parti de le faire, on devrait plaider coupable.

Avez-vous été personnellement remis en cause après cette campagne ?
Toutes les défaites sont imputables à la fédération, mais aucune victoire ne nous est gratifiée, pourtant, il me semble qu’on a aidé à gagner quelques mairies? C’est comme ça, la fédération endosse le rôle du punching-ball.

Certains ont été étonnés que Gaby Bellocq, « héros dacquois », ne soit pas applaudi lors du dernier Conseil général, qu’en dites-vous ?
Moi, je trouve sain qu’aucun de nos élus ne soit pris en flagrant délit de sauter sur les tables. On a toujours Sarkozy en face, toujours des gens qui sont dans la merde autour de nous : ce n’est pas une période qui justifie que l’on fasse une boom. Alors, évidemment, on est très heureux d’avoir pris Dax, c’est même quelque chose d’exceptionnel, mais pas question de tomber dans l’euphorie.

Pour revenir à Mont-de-Marsan, n’avez-vous pas sous-estimé Geneviève Darrieussecq ?
Moi, je ne l’ai jamais sous-estimée. Elle a réussi à faire ce que beaucoup d’autres n’avaient pas réussi à Mont-de-Marsan : rassembler la droite. Très bien, bravo, attendons de voir ce que ça va donner désormais.

Vous voilà leader de l’opposition montoise, n’avez-vous pas été tenté de le devenir plus tôt, dès l’entre-deux tours par exemple ?
Leader, je ne sais pas, mais en tout cas responsable et porte-parole de l’opposition, c’est sûr. Quant à être leader entre les deux tours, c’est vrai, je l’ai entendu. Mais je dois être mal formaté : j’ai un gros défaut en politique, je ne sais pas me mettre en avant. Je persiste à penser que Michel Cazaugade était à ce moment-là le bon candidat, peut-être au mauvais moment, mais il nous a permis de rattraper des voix.

Serez-vous tête de liste de la gauche dans six ans ?
(étonné) Je ne me pose même pas la question. On a six ans pour reprendre cette mairie et d’ici là, on va faire un travail d’opposition vigilante.

Pour l’avenir du PS, qu’il soit landais ou national, que souhaitez-vous ?
Qu’il y ait plus de convivialité entre socialistes landais. Quand des militants posent des questions, il faudrait que certains élus, même s’ils ont de hautes responsabilités, cessent de hurler et d’éructer. On doit se respecter un peu plus entre nous. Quant au niveau national, je crois que si certains n’acceptent pas de mettre un peu d’eau dans leur vin, ce sera vraiment le congrès de la dernière chance.

(1) Jean-Marie Boudey, conseiller général PS de Sore, a vu sa candidature refusée par la préfecture faute d’une pièce manquant à son dossier.