Les mouvements de contestation de ces derniers mois, y compris celui des gilets jaunes ou celui en faveur du climat, ont clairement fait ressortir, parmi d’autres, le sujet de la mobilité. L’enclavement et l’éloignement constituent des facteurs aggravants des fractures territoriales entre les métropoles intégrées mais toujours plus congestionnées et les espaces ruraux où le sentiment de déclassement et d’abandon se renforce.
Avec les perspectives urgentes et alarmantes concernant le changement climatique et les attentes fortes en matière d’accès à des moyens de transport en commun aussi bien pour les habitants que pour les acteurs économiques, la loi d’orientation des mobilités qui va être examinée au Sénat à partir du 19 mars 2019, ne pas passer à côté de ces enjeux. Les annonces récentes du Gouvernement et le texte présenté ne sont pas de nature rassurante. En termes de financement, avant même la discussion, on peut constater que le compte n’y est pas. Une communication avantageuse ne peut masquer la réalité des besoins de régénération de nos lignes.
Si les régions semblent sortir confortées en tant qu’acteurs incontournables des mobilités, c’est qu’elles ont permis de sauver et de pérenniser le transport ferroviaire en France. Cette compétence ne doit pas être diluée dans une nouvelle organisation qui irait à l’encontre d’une nécessité de cohérence et de coordination de la politique des transports. La Région n’a pas attendu la LOM pour créer le syndicat mixte Nouvelle-Aquitaine Mobilités chargé de renforcer l’intermodalité entre les modes de transports dans les bassins de mobilité, de développer le rabattement vers le réseau ferroviaire régional et de permettre de voyage avec un billet unique dès cette année.
Il est aussi important de rappeler, par exemple, que depuis la régionalisation des TER en 2002, la Région Nouvelle-Aquitaine a investi 1,4 milliards d’euros pour la rénovation des infrastructures, dont 426,4 M€ prévus dans les contrats de plan Etat-Région et ceci au-delà de ses compétences tout en payant chaque année 60 millions d’euros de péages.
Or, on constate cinq lignes de voyageurs sont directement menacées de fermeture d’ici 2020 (Angoulême-Limoges, Brive-Limoges par Saint-Yrieix, Libourne-Bergerac et Périgueux-Agen) et d’autres sont en sursis. Cette situation n’est plus acceptable ! Beaucoup de travaux ne sont pas engagés faute d’engagement de la part de l’Etat. Ainsi, sur l’ensemble des trois Contrats de plan Etat-Région (anciennes régions Aquitaine, Limousin et Poitou-Charentes), l’Etat a engagé 186 millions d’euros au 31 décembre 2017 (soit 24% de ses montants contractualisés), la Région 465 millions d’euros au 31 décembre 2018 (soit 84% de ses montants contractualisés). Par rapport à la maquette CPER, c’est-à-dire le plan de financement et les crédits contractualisés, seuls 14% des montants sont effectivement payés par l’Etat, 33% par la Région Nouvelle-Aquitaine !
Rappelons-le clairement et simplement : la préservation de ces liaisons ne pourra se faire à moyens constants ou avec des compléments précaires qui ne seraient pas à la hauteur des besoins réels. Il y a urgence et le temps du renvoi à des études bureaucratiques est révolu. L’Etat et SNCF Réseau ne peuvent continuer de faire porter la responsabilité aux régions sans que celles-ci n’aient voie au chapitre quant aux décisions qui relèvent d’un aménagement durable et équilibré de notre territoire et sans ouvrir la voie à des outils de financement intelligents dirigés vers investissements massifs ce qui ne semble pas être l’orientation prise par ce gouvernement.
Parallèlement, la Région Nouvelle-Aquitaine se mobilise pour la réouverture de ligne internationale Pau-Canfranc, outil d’attractivité et de développement économique pour ce bassin de vie, mais aussi pour permettre à la grande vitesse ferroviaire de poursuivre son chemin au sud de Bordeaux, facilitant la complémentarité avec les lignes régionales. On constate ainsi que la mise en service du tronçon Tours-Bordeaux a permis d’augmenter de 10% la fréquentation de nos TER. De plus, la Région s’engage fortement dans la transition énergétique avec l’expérimentation du train à hydrogène et d’un train hybride avec les régions Grand Est et Occitanie tout en favorisant activement le verdissement de la flotte routière et ferroviaire.
N’ayons pas peur d’innover dans chacun de ces domaines en étant audacieux sur les financements, ambitieux et imaginatifs pour desservir nos territoires décemment et innovants dans l’approche technique et technologique. C’est le sens des propositions faites par la Région Nouvelle-Aquitaine pour réinventer nos mobilités. Penser les déplacements autrement, c’est avoir la conviction que le ferroviaire peut être l’avenir de la LOM, c’est-à-dire au service des femmes et des hommes qui vivent et travaillent en Nouvelle-Aquitaine.
Renaud LAGRAVE
Vice-Président du Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine
en charge des infrastructures, des transports et des mobilités